L'avant-projet de Reforme du futur Code de Procédure Pénale révélé.
Le Ministère de la Justice vient de le soumettre dans un document de 225 pages se voulant " le plus compréhensible possible pour les Français ", selon la Chancellerie, aux différents acteurs concernés : syndicats de magistrats, avocats, policiers, associations de victimes et institutionnels.
Ces derniers vont être consultés durant " six semaines à deux mois ". Des modifications pourront être apportées à la marge, mais le coeur du dispositif envisagé par Michèle Alliot-Marie, à savoir la suppression du juge d'instruction et l'attribution des pouvoirs d'enquête au procureur ( magistrat du parquet subordonné à la Chancellerie ), n'est pas négociable. Le statut du parquet n'est pas abordé puisque tout changement devrait faire l'objet d'une réforme constitutionnelle.
Les Points Clés de la Réforme :
Le document confirme l'apparition dans la procédure pénale d'un " juge de l'enquête et des libertés " (JEL), dont le rôle sera de " contrôler " l'enquête conduite par le procureur. Magistrat expérimenté, le JEL pourra exiger que des actes soient menés et des enquêtes conduites, ce qui, pour la chancellerie, doit lever tout soupçon de partialité et de volonté d'enterrer des affaires sensibles.
Les deux systèmes co-existeraient pendant une période estimée par la Chancellerie à "trois ou quatre ans", la réforme étant mise en oeuvre pour les nouvelles procédures tandis que les instructions en cours iraient à leur terme.
Pour permettre à tout un chacun de faire valoir ses droits en justice, le texte prévoit l'avènement d'une " partie citoyenne ", qui pourra agir s'il n'existe pas de victime directe, en cas de préjudice à la collectivité publique.
Le ministère affirme par ailleurs vouloir mettre en chantier après les régionales une réforme de " l'aide juridictionnelle " - censée permettre aux personnes démunies d'avoir accès à un avocat - qui doit être augmentée en trouvant de nouvelles ressources.
L'avant-projet de réforme prévoit également une modification des conditions des gardes à vue, afin d'essayer de réduire leur nombre en forte augmentation. Cette mesure, qui doit répondre aux strictes " nécessités de l'enquête ", n'est envisageable que pour des crimes ou délits passibles " d'une peine d'emprisonnement ", dont le seuil n'est pas précisé.
Nouveauté : la possibilité pour une personne d'être entendue " librement s'il s'agit d'un délit puni d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans ", pendant quatre heures ou éventuellement six. Concernant le rôle de l'avocat durant la garde à vue, le ministère de la justice propose qu'une copie des procès-verbaux d'auditions " déjà réalisées " lui soit communiquée. Il ajoute à l'entretien d'une demi-heure prévu en début de garde à vue avec l'avocat un nouvel entretien à la 12e heure. Il prévoit aussi que lorsque la garde à vue (généralement de 24 heures) est prolongée, l'avocat puisse assister aux auditions de son client mais pas dès le début de la mesure.
Le texte indique enfin qu'une personne ne peut pas être condamnée "sur le seul fondement des déclarations" faites en l'absence de son avocat.
" On parle de violences policières ? Je propose qu'à terme, toutes les gardes à vue soient filmées ", a dit Michèle Alliot-Marie au Quotidien Le Parisien.
Enfin, le projet de loi prévoit également une modification des délais de prescription. En matière criminelle, la durée à partir de laquelle une personne ne peut plus être l'objet de poursuite pourrait passer de 10 à 15 ans après la commission des faits. En matière délictuelle, ce serait de 3 à 6 ans pour les actes passibles d'une peine d'emprisonnement supérieure à 3 ans, et reste à 3 ans pour les peines inférieures. Par ailleurs, la prescription de l'action prendrait désormais effet à compter du jour où a été commise l'infraction. Cette disposition aurait une conséquence directe sur les affaires financières. Jusqu'alors, la prescription ne courrait qu'à partir du moment où l'infraction était portée à la connaissance de la justice. Cette restriction ne serait dorénavant plus retenue que pour " un crime d'atteinte volontaire à la vie qui a été commis de façon occulte ou dissimulée. "