Deux mois après l'entrée en vigueur ce 1er octobre 2010 de la Loi du 9 juillet 2010 instituant le délit de violence psychologique et une ordonnance de protection, il est sans doute trop tôt pour dresser un bilan. "
A ce jour, une trentaine d’ordonnances ont été prises " selon le
Journal Métro qui précise, néanmoins, que "
plusieurs associations d’aide aux femmes victimes de violences, des parlementaires, des avocats, des magistrats et des syndicats ont lancé ce jeudi un Comité de vigilance pour s’assurer de sa bonne mise en œuvre.".
Des associations qui s'alarment “L’application de la loi suscite de grandes inquiétudes, explique Suzy Rojtman, du
Collectif national pour les droits des femmes.
Parce que les lois peuvent rester lettre morte. " Fumisterie !, fulmine Michèle Loup, de l’
association Elu/e/s contre les violences faites aux femmes. Ça ne nous donne aucun moyen supplémentaire, juste 12 spots télé de 30 secondes par an.” ou encore “C’est que de la com”, confirme Nicole Crépeau, de la
Fédération nationale Solidarité Femmes.
Sur le terrain en tout cas, le bilan semble contrasté et très disparate d'un territoire à l'autre.
Ainsi,
dans le Tarn, la politique basée sur la célérité et la certitude de la peine affichée par le Parquet d'Albi s'est traduite par une augmentation de
+101% de plaintes en 3 ans, un chiffre très largement supérieur à la moyenne nationale ( +37% ). " Plus intéressant encore, les plaintes des victimes de moins de 25 ans ont été quasiment multipliées par trois pour représenter près de 20% du total. «
Il y a un abaissement du seuil de tolérance. Les femmes n'attendent plus des années pour déposer plainte. » rapporte
La Dépêche rappelant au besoin que la fermeté du Parquet se retrouve à la barre du tribunal correctionnel: " 39% des prévenus jugés à Albi en 2008-2009 ont écopé d'une peine totalement ou partiellement ferme contre 16% au niveau national. "
Sur Paris, les initiatives ont été multipliées ces dernières années et la préfecture de police de Paris annonce avoir « modifié ses statistiques afin de comptabiliser désormais les violences psychologiques au même titre que les violences physiques », ce qui expliquerait l’augmentation significative constatée en 2009. Le
Journal Le Parisien relevait, dans l'édition de ce 25 novembre 2010, que « 176 policiers sont actuellement formés à ce problème et chaque commissariat d’arrondissement possède ses référents « violences conjugales ». Des psychologues, enfin, ont fait leur entrée dans les commissariats des XIIIe, XVe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements ».
Des actions encore insuffisantes selon les associations qui constatent une augmentation beaucoup plus significative du nombre de demandes de mise à l'abri au centre d'hébergement d'urgence.
Il reste que,
sorti de Paris intra-muros et mise à part la Seine-Saint-Denis, la prise en charge des victimes s'émousse et il est certain que,
lorsque une victime de violences psychologiques se voit rétorquer que sa situation s'assimile à une mésentente dans le couple, cette dernière, loin d'être incitée à faire valoir ses droits, aura tendance à rebrousser chemin.
C'est, en tout cas, le triste constat dressé par Christine à
Quimper, dans le Finistère, qui retrace à travers son témoignage le parcours du combattant évoqué par une grande majorité de victimes et rapporté par
le Télégramme.
Au vu de ces expériences et témoignages, il semble bien que l
es dénonciations par les victimes des violences conjugales qu'elles subissent doivent être mises en relation avec une réelle politique de prise en charge des victimes suivie d'une politique efficace de poursuite et de répression des auteurs.
Reste à déterminer si les réseaux de prise en charge des victimes, les agents de poursuite et les acteurs de la répression sont suffisamment formés pour déterminer ce qui ressort de la violence psychologique. Comme bon nombre de professionnels ayant pu relever la méconnaissance pour ne pas dire le déni opposé aux victimes, la perplexité voire l'inquiétude reste de mise.
Les violences conjugales ont entraîné en 2009 le décès de 165 personnes, dont 140 femmes, victimes de leur conjoint(e) ou ex-conjoint(e). Quel chiffre faudra-t'il atteindre pour que ce fléau commence à s'infléchir?